Médiation interculturelle et intergénérationnelle : constats et recommandations

Le conflit : une opportunité inévitable

Le conflit occupe une place centrale dans la vie sociale. Selon Georg Simmel et Lewis Coser, une certaine dose de confrontation est inévitable, voire nécessaire et saine, pour maintenir l’équilibre et favoriser l’évolution des relations humaines. Lorsque plusieurs cultures ou générations se rencontrent, ces dynamiques prennent une dimension particulière : divergences de valeurs, incompréhensions et tensions identitaires.

Plutôt que de percevoir ces conflits comme des échecs, il convient de les envisager comme des opportunités de dialogue, d’apprentissage mutuel et d’enrichissement collectif. La médiation interculturelle et intergénérationnelle, en offrant un espace sécurisé, devient un levier essentiel pour bâtir des ponts entre différences et similitudes.


Perceptions et préjugés : la nécessité de conscientiser les biais

La rencontre entre cultures génère souvent des malentendus liés à la langue, aux valeurs ou aux codes sociaux. Ces écarts favorisent l’apparition de stéréotypes et de préjugés, processus naturels de catégorisation mais potentiellement destructeurs (Antaki, 2006).

L’ethnocentrisme constitue un obstacle majeur : il consiste à considérer sa propre culture comme norme universelle et à juger les comportements différents comme « anormaux ». Cette posture alimente discriminations et amalgames (Antaki, 2006).

Constat : les biais implicites sont inévitables, mais ils doivent être identifiés et déconstruits pour éviter leur effet amplificateur sur les tensions.

Recommandation : toute démarche de médiation interculturelle devrait débuter par une phase d’éducation et de sensibilisation, où les parties prennent conscience de leurs biais et s’engagent à les dépasser.


Reconnaissance des besoins mutuels

Le conflit interculturel naît souvent d’un besoin perçu comme non satisfait. Certaines atteintes résultent de propos ou gestes influencés par des biais inconscients plutôt que par une intention malveillante. Différencier les actes des intentions est donc crucial.

Cependant, une considération des besoins et cultures de chacun est indispensable. Une résolution durable survient lorsque les parties transforment leur regard sur l’autre et reconnaissent ses besoins fondamentaux, souvent liés à l’identité et à la dignité (Mayer (2010).

Constat : les sociétés occidentales privilégient fréquemment l’individualisme au détriment du consensus, ce qui freine la recherche d’harmonie collective.

Recommandation : promouvoir une approche axée sur la considération culturelle, où collaboration et respect des besoins mutuels deviennent les piliers d’une solution durable.


Communiquer et collaborer : le cœur de la médiation

La gestion d’un conflit interculturel repose avant tout sur la qualité de la communication. Les recherches de Stonebanks et al. (2008) montrent qu’une posture éducative, plutôt que jugementale, favorise la sensibilisation et une issue constructive.

Les outils concrets incluent :

  • les questions ouvertes, pour explorer en profondeur les réalités de l’autre ;
  • la reformulation, pour clarifier et valider la compréhension mutuelle ;
  • le reflet, pour reconnaître et apaiser la charge émotionnelle.

Au-delà des techniques, certaines qualités s’imposent : tolérance, flexibilité, inclusion et capacité d’adaptation. En cas de blocage, la méta-communication — analyser le dialogue lui-même — permet aux parties de prendre conscience de leurs dynamiques et de les transformer.

Constat : certaines situations dépassent les capacités des parties à dialoguer directement.

Recommandation : l’intervention d’un médiateur interculturel neutre devient alors indispensable. Ce rôle consiste à recadrer la narration, rapprocher les parties sur leurs points communs et instaurer un climat propice à la coopération.


Conclusion

Les conflits interculturels et intergénérationnels touchent à l’essence des identités individuelles et collectives. Bien qu’inévitables, ils offrent des occasions précieuses de tisser des liens de compréhension et de respect.

Trois axes s’imposent :

  1. Prendre conscience des biais et préjugés pour réduire leur impact.
  2. Reconnaître les besoins et intérêts fondamentaux afin de bâtir des solutions mutuellement satisfaisantes.
  3. Favoriser une communication constructive et, lorsque nécessaire, s’appuyer sur la médiation professionnelle pour dépasser les blocages.

Onésence s’inscrit dans cette mission : offrir des espaces de dialogue interculturel et intergénérationnel où les différences deviennent des ressources, et où les conflits se transforment en leviers de cohésion sociale.


Références

  • Antaki, N. (2006). Cultural Diversity and ADR Practices in the World. Kluwer Law International.
  • Mayer, B. (2010). The Dynamics of Conflict Resolution: A Practitioner’s Guide.
  • Rosenberg, M., & Eckman, P. Communication non-violente.
  • Stonebanks, D. et al. (2008). Comment mener les discussions difficiles. Éditions du Seuil.
  • Roberge, J.-F. (2020). Prévention et règlement des différends. Conseiller et négocier. Éditions Yvon Blais.
  • Thomas, M. Acquérir une compétence interculturelle. Mémoire de D.E.S.S. en psychologie.
  • Vatz Laaroussi, M., & Tadlaoui, J.E. (2013). Les médiations interculturelles dans la société pluraliste du Québec.

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